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pharmaco-medicale

Site du Collège National de Pharmacologie Médicale

Risque des médicaments

Les points essentiels

La iatrogénie médicamenteuse représente un peu plus d’un million de journées d’hospitalisations pour 130 000 patients chaque année en France. Les interactions médicamenteuses (IM) sont à l’origine d’environ 20 % de cette iatrogénie médicamenteuse.

Les interactions médicamenteuses peuvent être schématiquement divisées en deux:

- Les IM pharmacocinétiques

- Les IM pharmacodynamiques

IM Pharmacocinétique : c’est une interaction au cours de laquelle un médicament va modifier la pharmacocinétique d’un autre médicament. Ces IM suivent le devenir d’un médicament dans l’organisme : absorption intestinale, diffusion, métabolisme et excrétion. Il convient de noter que les IM autrefois attribuées à un déplacement des protéines plasmatiques (baisse de la fixation aux protéines plasmatiques) ne se manifestent que lorsque s’y surajoute un autre mécanisme, comme une inhibition de CYP ou de transporteurs. Ainsi, même si ce phénomène existe, il est très marginal et ne doit pas être considéré comme une cause majeure d’IM.

 Les IM pharmacocinétiques qui ont une conséquence clinique sont celles qui intéressent la pharmacocinétique d’un médicament à index thérapeutique étroit, c’est à dire dont les seuils de toxicité par surdosage et d’inefficacité par sous-dosage sont proches (ex anticancéreux, immunosuppresseur, anti arythmiques...).

IM Pharmacodynamique : c’est une interaction au cours de laquelle l’activité pharmacodynamique d'un médicament va amplifier (« synergie additive ou potentialisatrice»), ou au contraire, s’opposer (« antagonisme ») à l’activité pharmacodynamique d’un autre médicament. On peut distinguer les interactions par addition d’un même effet et celles dont la pharmacodynamie d’un médicament va potentialiser celle d’un autre.

  • Les IM synergiques sont très fréquemment observées : lorsque que l’on prescrit 2 médicaments antihypertenseurs, le risque d’hypotension artérielle orthostatique est naturellement plus fréquent. Il en va de même lorsque l’on prescrit un antihypertenseur avec un antidépresseur qui a des propriétés alpha bloquantes comme les tricycliques ; le risque d’hypotension artérielle orthostatique est majoré. La synergie peut également concerner les effets indésirables ; ainsi, la co-prescription d’un hypocholestérolémiant de la classe des fibrates et d’un hypocholestérolémiant de la classe des statines va augmenter le risque de toxicité musculaire.
  • Les IM par potentialisation sont aussi souvent constatées : un diurétique hypokaliémiant va augmenter le risque de torsade de pointe d’un autre médicament qui allonge l’espace QT sur l’électrocardiogramme. Un sel de calcium I.V. chez un patient traité par digoxine va exposer le patient à des troubles du rythme cardiaque. La co-prescription d’un anticoagulant oral et d’un AINS va exposer à un risque accru d’hémorragie digestive.
  • Les IM par antagonisme peuvent diminuer l’efficacité d’un médicament : les AINS diminuent l’effet antihypertenseur des IEC ; les morphiniques à effet agoniste-antagoniste diminuent l’effet antalgique des analgésiques opiacés et provoquent un syndrome de sevrage ; les agonistes dopaminergiques et les neuroleptiques s’antagonisent mutuellement. Les IM par antagonisme peuvent aussi être mises à profit pour s’opposer à l’effet principal d’un médicament, par exemple en cas de surdosage : le flumazénil occupe avec une haute affinité les récepteurs aux benzodiazépines et est utilisé pour lever un surdosage en benzodiazépines.

Gradation du risque d’interaction médicamenteuse : Sur le plan réglementaire, les IM sont divisées en 3 groupes que l’on retrouve dans le Résumé des Caractéristiques du Produit (RCP) :

  • A prendre en compte : dont les conséquences cliniques sont incertaines (fréquence et gravité du risque faibles). En pratique, essayer de prescrire un autre médicament n’exposant pas à ce risque d’interaction.
  • Association déconseillée : dont les conséquences sont certaines (parfois graves) mais qui dans certaines circonstances cliniques, ne peuvent être évitées.
  • Contre indication : le risque que l’on fait courir au patient est tel qu’il ne faut pas prescrire l’association médicamenteuse incriminée. En pratique, il est impératif de prescrire un autre médicament de la même classe (ou d’une autre classe) n’exposant pas à ce risque d’interaction.

Les IM sont pour la plupart évitables; il convient donc de les rechercher lorsque l'on prescrit plus d’un médicament. S’il est important de connaître les principales IM, il est en revanche inutile (et illusoire, vu leur nombre) d’en apprendre les listes par cœur. En revanche, une bonne compréhension des mécanismes impliqués et de la pharmacologie des médicaments peut permettre de les anticiper, même avec un nouveau médicament. En pratique, l’utilisation d’un dictionnnaire des médicaments est conseillée avant de prescrire plusieurs médicaments en même temps. Le risque d’IM croît avec le nombre de médicaments sur une ordonnance.

Certains sujets sont plus à risque : il s’agit par exemple des sujets les plus âgés, d’une part du fait de la polymédication et d’autre part en raison de leur plus grande fragilité (réduction de la fonction rénale et hépatique avec l’âge).

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