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pharmaco-medicale

Site du Collège National de Pharmacologie Médicale

Triptans

Résumé de la fiche

Le suffixe « triptan » désigne des molécules ayant en commun le noyau indole de la sérotonine. Ce sont des agonistes sélectifs des récepteurs 5HT1B et 1D de la sérotonine, dotées d’une efficacité clinique dans le traitement de la crise de migraine. Ils agissent par 2 mécanismes principaux : vasoconstriction des vaisseaux intracraniens et inhibition de la libération de substances algogènes et inflammatoires.

Tous les « triptans » commercialisés ont fait la preuve de leur efficacité au cours d’essais cliniques bien conduits. Ils sont efficaces sur la céphalée migraineuse et améliorent également les signes associés à la crise (troubles digestifs, photophobie, incapacité fonctionnelle). En revanche ils sont sans effet sur les signes de l’aura. 


Ces médicaments peuvent être associés aux antalgiques et aux AINS mais ils sont déconseillés en association aux dérivés ergotés à moins de 24h d'intervalle. Ils sont contre-indiqués avec les IMAO par risque de survenue de syndrome sérotoninergique. Il existe de multiples formes galéniques permettant une utilisation par voie orale (sumatriptan, élétriptan, zolmitriptan, naratriptan), lyophilisat (zolmitriptan), par voie per-nasale (sumatriptan) ou sous-cutanée (sumatriptan) qui permettent de choisir la spécialité la plus adaptée au patient en fonction de la présence de troubles digestifs, de la sévérité de la crise…

Outre la migraine, certains médicaments (sumatriptan) ont des indications dans le traitement d’autres formes de céphalée vasculaire (algie de la face).

Item(s) ECN

97 : Migraine, névralgie du trijumeau et algies de la face

Médicaments existants

Le premier triptan, le sumatriptan, a été commercialisé dans les années 1990. Depuis d'autres molécules ont été commercialisées :
naratriptan,
zolmitriptan,
élétriptan,
almotriptan,
frovatriptan
rizatriptan

Les triptans ont des formes galéniques diverses :
- comprimés classiques et orodispersibles
- spray nasal
- auto-injectables (voie sous-cutanée)

Le sumatriptan possède la biodisponibilité la plus faible et la demi-vie la plus courte. Ce dernier est la seule molécule disponible en forme injectable.

Mécanismes d’action des différentes molécules

Les « triptans » antimigraineux sont des agonistes sélectifs des récepteurs 5HT1B/D de la sérotonine. La stimulation de ces récepteurs, présents au niveau post-synaptique sur les artères cérébrales, détermine une vasoconstriction. La liaison des agonistes sérotoninergiques aux autorécepteurs 5HT1B/D pré-synaptiques inhibe la libération de neuropeptides pro-inflammatoires (peptide lié au gène de la calcitonine (CGRP), peptide vasoactif intestinal (VIP), substance P), facteurs vasodilatateurs impliqués dans la physiopathologie de la crise migraineuse. 

La combinaison de ces deux effets explique la capacité des « triptans » à prévenir ou à réverser la réaction inflammatoire méningée considérée comme expliquant la céphalée migraineuse. Certains « triptans » qui franchissent la barrière hémato-méningée, pourraient inhiber le fonctionnement du « générateur » central au niveau des noyaux du raphé du tronc cérébral.

Effets utiles en clinique

- Migraine : Les médicaments de cette classe pharmacologique sont efficaces dans le traitement de la céphalée migraineuse. Ils améliorent également les signes associés à la migraine (nausées et vomissements, photophobie et phonophobie) ainsi que l’invalidité liée à la crise. Leur efficacité est identique sur les crises de migraines avec ou sans aura. Par contre, ils n’ont aucun effet sur l’aura migraineuse et ne doivent pas être utilisés à cette phase de la crise.

- Algie vasculaire de la face : Bien que plusieurs « triptans » et plusieurs formes galéniques aient été évalués dans cette indication, seul le sumatriptan par voie injectable (6 mg par voie sous cutanée) possède une AMM pour le traitement de cette forme relativement rare de céphalée primitive. 

Pharmacodynamie des effets utiles en clinique

Traitement de la crise de migraine

- L’efficacité des médicaments de cette classe pharmacologique a été évaluée sur leur capacité à faire passer la céphalée migraineuse d’une intensité modérée ou sévère vers une céphalée légère ou absente dans un délai de temps variable (2 ou 4 heures). Le gain thérapeutique (efficacité en % de la molécule étudiée – efficacité en % du placebo) varie de 17-40% pour le soulagement à 2 heures et de 10-30% pour la disparition totale de la céphalée en fonction des molécules, des études et des doses. 

- En général, l’intensité de l’effet est dépendant de la dose mais l’augmentation d’efficacité sur la céphalée aux doses fortes va de pair avec une augmentation des effets indésirables. Les triptans sont inefficaces lorsqu’administrés durant la phase de l’aura.

- La récidive de la crise dans les heures suivant l’amélioration ou la disparition de la céphalée après une première prise reste élevée (17-40% des cas suivant les molécules). Une deuxième prise de « triptan » semble être efficace pour le traitement des récidives, dans les 2 à 4h après la première prise selon la molécule.

- Une métanalyse de 2001 (Ferrari et al, Lancet 2001 ; 358 : 1668-1675) a comparé les différents triptans commercialisés en France (posologies usuelles par voie orale) au sumatriptan (100 mg per os). Les résultats sont résumés dans le tableau suivant (Tableau 12):

Tableau 12 : Efficacité comparative des différents agonistes 5HT1B/D. = : identique au sumatriptan 100 mg per os; > supérieur au sumatriptan ; > : inférieur au sumatriptan

 

Soulagement à 2 heures

Disparition complète de la céphalée

Constance d’efficacité

Acceptabilité

Sumatriptan 50 mg

=

=

=

Zolmitriptan 2,5 mg 

=

=

=

=

Naratriptan 2,5 mg

>> 

Almotriptan 12,5 mg

=

+

+

+

Elétriptan 40 mg

=

Traitement de la crise d’algie vasculaire de la face

- Le sumatriptan constitue la seule molécule dont l’efficacité a été démontrée dans le traitement de la crise d’algie vasculaire de la face. Après 6 mg par voie sous-cutanée, une amélioration de la douleur s’observe au bout de 15 minutes chez 74-96% des patients traités par sumatriptan contre 26% des patients recevant un placebo. La douleur disparaît totalement chez 36% des patients sous sumatriptan contre 3% des patients recevant le placebo. L’efficacité des autres formulations de sumatriptan ou des autres médicaments de cette famille reste peu documentée.

- L’efficacité du sumatriptan dans cette affection rare, pour laquelle il n’existe pas d’autres médicaments, explique le statut de médicament d’exception du sumatriptan injectable (6 mg par voie sous-cutanée).

Caractéristiques pharmacocinétiques utiles en clinique

Tableau 13 : Principales caractéristiques pharmacocinétiques des agonistes 5HT1B/Dutilisés dans le traitement de la crise de migraine. 

 

Biodisponibilité (%)

Tmax (h)

½ vie (h)

Métabolisme

Métabolite actif

Elimination

Sumatriptan

sc : 96,

per nasal : 15.8,

per os : 14.3

0,17 h

1,5 h

2 h

2 h

MAO-A

non

Hépatique (80%)

Zolmitriptan

40-46

1,5 h

2,5-3 h

MAO-A, CYP1A2

oui

Hépatique

Naratriptan

60-70

2-3 h

6 h

Cytochrome P450

non

Rénale (50%)

Elétriptan

50

1,5 h

4-5 h

MAO-A, CYP3A4

oui

Hépatique

Almotritpan

70

1-3 h

3,5 h

MAO-A, CYP3A4 et 2D6

non

Rénale (65%)

Frovatriptan 22 à 30% 2-4 h 26h CYP1A2 oui Rénale (62%)
Rizatriptan 40-45 % 2 h 2-3 h MAO-A oui, faiblement Rénale (80%)

Source de la variabilité de la réponse

Age : 
- La plupart des essais cliniques ont été menés sur des patients migraineux ayant entre 18 et 65 ans. Peu de données documentent l’efficacité chez l’enfant ou l’adolescent sauf pour le sumatriptan par voie per-nasale. 

La crise de migraine : 
- Pour chaque patient la reproductibilité de l’effet thérapeutique d’une crise à l’autre est variable selon les molécules. Elle implique l’essai de chaque médicament sur un minimum de 3 crises avant de pouvoir conclure quant à l’efficacité. Il n’y a pas d’éléments utiles à la prédiction de la réponse.

- Les crises de migraine avec aura ou les crises menstruelles semblent aussi sensibles aux triptans que les crises habituelles de migraine sans aura. 
- L’administration du médicament n’est pas recommandée durant la phase de l’aura et n’influe pas plus le déroulement de l’aura qu’elle ne prévient l’apparition de la céphalée. 
- Le délai de la prise par rapport au début de la crise ne paraît pas influencer l’efficacité 

Les caractéristiques pharmacocinétiques et la forme pharmaceutique :
- Les molécules à forte biodisponibilité et les formes d’administration parentérale (injectables ou per-nasales) s’associent à un meilleur taux de réponse et à une amélioration plus rapide de la céphalée
- La fréquence de survenue des récidives de la crise migraineuse paraît diminuer quand la demi-vie des médicaments augmente.

Situations à risque ou déconseillées

Les contre-indications à l’utilisation des agonistes des récepteurs 5HT1B/D sont présentées dans le tableau 6.

 

Tableau 14: associations médicamenteuses contre-indiquées avec ces médicaments.  

 

Classe ou molécule

Conséquences

Mécanismes

Commentaires

Antimigraineux

Crise

 

 
Dérivés ergotés
 

Risque d'hypertension artérielle, de vasoconstriction artérielle coronaire. 

Potentialisation pharmacodynamique
 

Respecter un délai de 24 heures entre l'arrêt du « triptan » et la prise de l'alcaloïde.

Autres médicaments

IMAO sélectifs ou non
 
 
 
 
 
 
Inhibiteurs du CYP3A4 (antifongiques azolés, macrolides, inhibiteurs de protéase (« navirs »)

Risque d'hypertension artérielle, de vasoconstriction artérielle coronaire
 
 
 
Accumulation

Inhibition du métabolisme, interaction pharmacodynamique
 
 
  

Inhibition du métabolisme

Tous les « triptans » ne sont pas métabolisés par la MAO mais la CI est valable pour tous.

 

Valable pour élétriptan

Précautions d’emploi

- Les « triptans » ne sont pas indiqués dans la migraine hémiplégique, ophtalmoplégique ou basilaire. Ils ne doivent être prescrits qu’après avoir établi un diagnostic certain de migraine ;
- Chez les patients à risque cardiovasculaire en raison du risque d’ischémie coronaire ;
- Chez les insuffisants rénaux ou hépatiques en fonction de la voie d’élimination ; 

Association à d’autres médicaments :
- Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (risque de syndrome sérotoninergique)
- Cimétidine : inhibition de la dégradation du zolmitriptan par le CYP1A2

Effets indésirables

Tableau 15 : Principaux effets indésirables des agonistes des récepteurs 5HT1B/D utilisés dans le traitement de la migraine.

Classe ou molécule

Nature de l’effet

 

Commentaires

Agonistes 5HT1B/D 

Effets généraux : 

Lourdeur, pression, douleur au niveau de la gorge, du cou, des membres et de la poitrine
Myalgies, paresthésies, dysesthésies

Effets communs à tous les « triptans »

 

Cardiovasculaires 

-Tachycardie, palpitations, troubles du rythme

-Augmentation transitoire de la pression artérielle
-Accidents ischémiques coronaires


Favorisés par la prescription chez sujets à risque.

 

Système nerveux central

-Sédation
-Céphalées chroniques quotidiennes

Effet comun à tous les « triptans »
En cas d’usage trop fréquent

 

Liés au mode d’administration

-Voie per-nasale (sumatriptan)
-Voie sous-cutanée

Irritation, sensation de brûlure
Douleur au point d’injection

Surveillance des effets

- En cas d’absence de réponse satisfaisante à posologie usuelle sur plusieurs crises, une augmentation de la dose peut être proposée en l’absence de contre-indication et sous réserve d’une acceptabilité correcte. L’absence de réponse à un « triptan » ne présage pas de la réponse aux autres médicaments de la même classe pharmacologique.

- La survenue d’effets indésirables à type d’oppression thoracique impose des explorations spécialisées à la recherche d’une cardiopathie ischémique.

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  • 31 mai 2017