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Site du Collège National de Pharmacologie Médicale

Inhibiteurs mixtes de recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNa)

Résumé de la fiche

Appelés encore antidépresseurs à « dualité d’action » du fait de leur impact sur le système sérotoninergique et noradrénergique, les inhibiteurs mixtes de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNa) sont une classe de médicaments parmi lesquels le milnacipran, la venlafaxine et la duloxétine sont les seuls à avoir obtenus l’AMM en France.

Au niveau pharmacocinétique, la duloxétine et la venlafaxine ont une phase de métabolisation majeure par le CYP2D6 (avec production d’un métabolite actif pour la venlafaxine) et sont inhibiteurs faibles à modérés du CYP2D6.

Au niveau pharmacodynamique, le mécanisme d’action passe par l’inhibition des transporteurs SERT et NET et donc diminuent la recapture pré-synaptique de la sérotonine et de la noradrénaline, potentialisant ainsi l’effet de ces neuromédiateurs dans le système nerveux central. Ces médicaments ont une efficacité similaires aux autres classes d'antidépresseurs dans le traitement de l'EDC.

Ces médicaments se distinguent des ISRS par leur action supplémentaire sur la transmission noradrénergique et se distinguent des imipraminiques par leur absence d’activité sur les récepteurs cholinergiques et histaminiques H1.Ces médicaments n’ont que peu d’activité sur les récepteurs atropiniques ou histaminergiques H1 entraînant de ce fait des effets indésirables beaucoup moins nombreux que les imipraminiques. Les effets indésirables des IRSNa sont à rapprocher des ISRS avec en plus un risque d'augmentation de la pression sanguine artérielle, de tachycardie et des syndromes d'arrêt plus fréquents.

Item(s) ECN

66 : Diagnostiquer : un trouble dépressif, un trouble anxieux généralisé, un trouble panique, un trouble phobique, un trouble obsessionnel
74 : Prescription et surveillance des psychotropes
330 : Prescription et surveillance des classes de médicaments les plus courantes chez l’adulte et chez l’enfant

Médicaments existants

Trois IRSNa ont une autorisation de mise sur le marché en France :

  • Duloxetine
  • Milnacipran
  • Venlafaxine

Mécanismes d’action des différentes molécules

Les IRSNa sont des inhibiteurs puissants du recaptage de la sérotonine (inhibition du SERT) et de la noradrénaline (inhibition du NET). L'inhibition du NET augmente également la dopamine dans le cortex préfrontal. Ces médicaments sont dépourvus d’affinité pour les récepteurs muscariniques, alpha-1 adrénergiques et histaminergiques.

La venlafaxine inhibe la recapture de sérotonine de façon puissante et robuste à faible dose, tandis que l'inhibition de la recapture de noradrénaline est modérément puissante et robuste seulement à fortes doses.

La duloxétine induit une inhibition du SERT légèrement plus puissante que celle du NET.

Le milnacipran est un inhibiteur plus puissant du NET que du SERT.

Effets utiles en clinique

Les effets cliniques recherchés sont d’abord le traitement des symptômes de l’épisode dépressif caractérisé. La venlafaxine est également indiquée dans la prévention de la récidive des épisodes dépressifs caractérisés.

La venlafaxine et la duloxétine ont aussi une AMM dans le traitement du trouble anxieux généralisé. La venlafaxine est également indiquée dans le traitement du trouble anxiété sociale et du trouble panique.

La duloxétine a également une AMM dans le traitement de la douleur neuropathique diabétique périphérique.

Pharmacodynamie des effets utiles en clinique

Le mécanisme d’action des IRSNa repose sur une potentialisation de l’activité monoaminergique (noradrénaline et sérotonine) au niveau du système nerveux central. L’action sérotoninergique est similaire à celle des ISRS, l’action noradrénergique serait également potentialisatrice des voies descendantes inhibitrices de la douleur au niveau du système nerveux central.

Cette propriété noradrénergique est à l’origine d’une augmentation du rythme cardiaque et de la pression sanguine artérielle, au moins à l'introduction du médicament (adaptation sympathique après quelques jours).

Caractéristiques pharmacocinétiques utiles en clinique

Les IRSNa sont résorbés par le tractus gastro-intestinal et subissent un effet de premier passage marqué. Le pic plasmatique est atteint 2 à 4h après administration. La fixation aux protéines plasmatiques est plus faible que pour les ISRS (de 13 à 30%).


Contrairement au milnacipran dont le métabolite n’est pas actif, la venlafaxine est presque totalement métabolisée par le cytochrome CYP 2D6 (et de façon moindre par le CYP 3A4) et son métabolite, le O-déméthylvenlafaxine (desvenlafaxine), est également actif avec une ½ vie bien supérieure au produit mère (11h contre 5h). La venalafaxine est inhibiteur faible du CYP2D6.
La duloxétine est métabolisée principalement par le CYP1A2 et le CYP2D6. La duloxétine est inhibiteur modéré du CYP2D6.

L’élimination des IRSNa s’effectue essentiellement par voie rénale.

Source de la variabilité de la réponse

De même que pour la venlafaxine, la variabilité inter-individuelle (âge, sexe) du milnacipran est faible.

Situations à risque ou déconseillées

Tous les IRSNa sont contre-indiqués en association avec un traitement par inhibiteurs irréversibles de la monoamine-oxydase (IMAO).

Le milnacipran est contre-indiquée en cas d'allaitement, d'hypertension artérielle non contrôlée, de pathologie coronarienne, ou de rétention urinaire (obstacle sur les voies urinaires excrétrices, adénome prostatique, hypertrophie prostatique). Son utilisation est déconseillée chez l'enfant et l'adulte jeune (<18 ans).

La duloxetine est contre-indiquée en cas d'insuffisance hépatique ou rénale chronique, ainsi qu’en cas d’HTA non équilibrée. Elle est déconseillée chez l'enfant et l'adulte jeune et en cas d'allaitement

La venlafaxine est déconseillée chez l'enfant et l'adulte jeune (<18 ans). L’administration durant l’allaitement est soumise à l’évaluation des bénéfices de la venlafaxine pour la mère et de l’allaitement pour l’enfant.

Précautions d’emploi

Des précautions d’emploi doivent être prises chez les patients ayant une insuffisance rénale, une cirrhose et/ou une insuffisance hépatique pour la venlafaxine (avec réduction de dose) et chez les patients ayant une insuffisance rénale pour le milnacipran. La duloxétine ne doit pas être prescrite en cas de pathologie hépatique avec risque de dysfonction hépatique et contre-indiquée en cas d’insuffisance rénale sévère. 

L’association d’un IRSNa avec de l’adrénaline ou noradrénaline (risque d’hypertension paroxystique), de la clonidine (inhibition de l’effet antihypertenseur), un IMAO (risque de syndrome sérotoninergique) est contre-indiquée.

Effets indésirables

Le traitement de l’épisode dépressif par un IRSNa peut entraîner des nausées, des vertiges, des somnolences. Ces effets indésirables sont plus fréquents en début de traitement et souvent réversibles. Plus rarement, des effets indésirables tels des vomissements, des tremblements, des troubles de l’érection.

Les IRSNa sont à l'origine des mêmes effets indésirables que les ISRS, notamment en ce qui concerne le risque de syndrome sérotoninergique et d’hyponatrémie. Ils sont à l'origine d'augmentation de la fréquence cardiaque et de la pression sanguine artérielle. La duloxétine et la venlafaxine peuvent être responsables de manifestations cutanées d’hypersudation, sueurs nocturnes et d’éruptions cutanées.

La survenue de syndromes de sevrage sous IRSNa est plus fréquente qu'avec les ISRS (à l’exception de la paroxétine).

Surveillance des effets

En début de traitement, le risque suicidaire est élevé chez les patients déprimés. La levée de l’inhibition psychomotrice pouvant précéder l’action antidépressive du médicament, une surveillance du risque en début de traitement est nécessaire.

L’administration de milnacipran à des patients traités par des cardiotoniques nécessite une surveillance particulière.

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  • 11 mai 2023