Phénobarbital

Résumé de la fiche

Le phénobarbital (PB) est un des anti-épileptiques les plus anciens et il est efficace sur tous les types d'épilepsies à part les absences typiques. Toutefois, son profil pharmacocinétique (inducteur enzymatique) et ses nombreux effets indésirables limitent son utilisation en première intention dans le traitement au long cours des épilepsies.

Item(s) ECN

72 : Prescription et surveillance des psychotropes
103 : Épilepsie de l'enfant et de l'adulte
133 : Anesthésie locale, locorégionale et générale
326 : Prescription et surveillance des classes de médicaments les plus courantes chez l’adulte et chez l’enfant Prescription et surveillance des classes de médicaments les plus courantes chez l’adulte et chez l’enfant

Médicaments existants

Phénobarbital, per os, injectable

 

Mécanismes d’action des différentes molécules

Les propriétés anti-épileptiques du phénobarbital s’expliquent par son action au niveau de la transmission GABAergique en renforçant cette transmission, réduisant ainsi l’activité électrique des neurones. Cependant, l’action antiépileptique passe probablement également par une modulation de la liaison post-synaptique des acides aminés excitateurs (glutamate) à leurs récepteurs NMDA et AMPA.

Effets utiles en clinique

Le phénobarbital (PB) est un médicament des plus prescrit dans le monde à cause de son faible coût.

Le phénobarbital est utilisé dans l’épilepsie, pour traiter les épilepsies partielles et généralisées tonico-cloniques, en monothérapie ou en traitement associé à un autre traitement anti-épileptique. Le phénobarbital n’est pas efficace dans les absences typiques. Toutefois, malgré son efficacité, il n'est plus prescrit dans cette indication en raison de la fréquence des ses effets indésirables.

Il est également indiqué dans l’état de mal épileptique, après échec des benzodiazépines ou de la phénytoïne sous la forme injectable

 

Pharmacodynamie des effets utiles en clinique

Le PB est actif dans toutes les formes d'épilepsie à l'exception des absences typiques. Il est particulièrement efficace dans les crises convulsives généralisées d'emblée ou secondairement.

 

Caractéristiques pharmacocinétiques utiles en clinique

La concentration plasmatique thérapeutique est comprise entre 15 et 40 mg/L. La posologie habituelle administrée est comprise entre 60 et 180 mg/j, pris le soir.

La cinétique du phénobarbital est soumise à de grosses variations inter-individuelles, ce qui justifie la surveillance des concentrations plasmatiques pour permettre un meilleur contrôle des convulsions et une meilleure adéquation entre la clinique et la posologie. Il est par ailleurs à noter que les concentrations plasmatiques d’équilibre sont difficiles à atteindre : le contrôle des convulsions peut parfois être observé jusqu’à 15 jours après le début du traitement et justifie dans certains cas une dose de charge initiale en phénobarbital.

Absorption

Elle est bonne au niveau gastro-intestinal. Le pic de concentration est à 8 heures environ chez l’adulte et 4 heures chez l’enfant.

Distribution

La distribution a lieu dans tout l’organisme notamment dans le cerveau. Il traverse également la barrière placentaire et passe dans le lait maternel. La fixation aux protéines plasmatiques moyenne est de 50%.

Métabolisation

Il est métabolisé en partie au niveau hépatique en métabolite inactif. Ce métabolisme peut être modulé par les autres antiépileptiques. Il est inducteur des cytochromes P450 et intervient de ce fait avec le métabolisme de nombreuses molécules.

Excrétion

L’excrétion est sous forme inchangée à 25% dans les urines. La demi-vie plasmatique est comprise entre 40 à 140 heures chez l’adulte et 40 à 70 heures chez l’enfant.

Source de la variabilité de la réponse

La réponse au phénobarbital peut être affectée en raison d’interactions avec d’autres médicaments :

- avec le millepertuis, inducteur enzymatique (contre-indication)

- avec les autres antiépileptiques : ces associations nécessitent des précautions d’emploi, et des ajustements posologiques de l’un ou l’autre des antiépileptique, en fonction de la modulation enzymatique (induction ou inhibition). En particulier, on retiendra l’association avec l’acide valproïque, la phénytoïne (et par extrapolation la fosphénytoïne) et le felbamate.

- avec les folates : diminution des concentrations plasmatiques du phénobarbital par augmentation de son métabolisme car les folates sont co-facteurs du métabolisme du phénobarbital : association déconseillée avec surveillance clinique et contrôle des concentrations plasmatiques si elle est indispensable.

Situations à risque ou déconseillées

En raison de ses propriétés d’inducteur enzymatique, ces situations à risque sont à connaitre :

-         association avec précaution avec la carbamazépine, la digitoxine, le métoprolol et le propranolol, les antiarythmiques de classe I, la doxycycline, l’itraconazole, le midazolam, le montélukast, le praziquantel, la tiagabine, la théophylline, la télithromycine : diminution significative des concentrations plasmatiques de ces produits.

-         contre-indication avec le saquinavir et le voriconazole : diminution de l’efficacité de ces deux produits par augmentation de leur métabolisme hépatique.

-         contre-indication avec l’ifosfamide, lorsque le phénobarbital est administré à visée prophylactique (épilepsie due à l’ifosfamide) : risque de majoration du risque neurotoxique par augmentation du métabolisme hépatique de l’ifosfamide.

 

Les données sur une utilisation pendant la grossesse ne sont pas assez nombreuses pour pouvoir exclure un risque qui, s’il existe, semble faible. Aussi, en cas de grossesse, il n’est pas légitime d’interrompre le traitement par phénobarbital si celui est nécessaire.

 

Une suplémentation par vitamine K1, dans le mois précédent l’accouchement et au nouveau-né doit être réalisée pour limiter le risque hémorragique lié à l’induction enzymatique du métabolisme des facteurs de coagulation vitamine K-dépendants.

Précautions d’emploi

En ce qui concerne les intéractions, il est nécessaire de faire attention à l’association du phénobarbital avec les médicaments dont le métabolisme peut être induit et l’efficacité réduite (antagonistes du calcium, antiprotéases, anticoagulants oraux, immunosuppresseurs, corticoïdes, hormones thyroïdiennes, méthadone).

L’association avec les antidépresseurs imipraminiques ou autres dépresseurs du SNC est à prendre en compte en raison de la diminution du seuil épileptogène.

Par ailleurs, la contraception oestroprogestative est inefficace en cas de traitement par phénobarbital et il est conseillé d’utiliser une autre méthode contraceptive.

Effets indésirables

L’effet indésirable le plus fréquemment rapporté avec le phénobarbital est la sédation, qui a tendance à disparaître au fur et à mesure de l’administration.

Sont décrits également :

- des désordres hématologiques, parfois fatals quand il s’agit d’agranulocytose, sont observés en raison notamment de la carence en folates lors des traitements chroniques, mais également au cours des réactions d’hypersensibilité.

- les réactions d’hypersensibilité, propres aux antiépileptiques arômatiques (carbamazépine, oxcarbazépine, phénobarbital, primidone et phénytoine) doivent être évoquées devant tout symptôme à type de fièvre, rash cutané, lymphadénopathies, lymphocytose, éosinophilie, et atteinte hépatique ou autre organe. Les symptômes surviennent préférentiellement dans les 8 premières semaines de traitement, avec un risque très important d’allergie croisée entre les antiépileptiques arômatiques.

En cas de supplémentation, des précautions sont à prendre en compte puisque l’administration concomitante de folates est à l’origine d’une diminution de concentration plasmatique du phénobarbital.

- à dose importante, un nystagmus et une ataxie. La dépression respiratoire induite par les barbituriques peut être sévère.

- des réactions cutanées chez 1 à 3% des patients : le plus communément, éruptions maculo-papulaires, morbilliformes ou scarlatiformes. Mais il existe des réactions plus sévères, extrêmement rares à type de dermatites exfoliatives, de Steven Johnson ou de Lyell.

- des atteintes hépatiques

- des atteintes neuropsychiques surtout à type de sédation. Toutefois, une excitation paradoxale peut être observée avec perte de sommeil et de confusion chez des personnes âgées alors que les enfants peuvent présenter une irritabilité et une hyperactivité.

Imprimer la fiche

  • 31 mai 2017